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16 mars 2004

Espagne : qu’attendre de cette victoire ?

 

Por Benito Perez
Mardi 16 Mars 2004

« Zapatazo a Aznar » (coup de bottes à Aznar). Le titre d’un grand quotidien espagnol, hier - en jouant avec le nom du leader socialiste Zapatero -, résumait parfaitement la magistrale sanction populaire infligée dimanche à José Maria Aznar. Dans un réveil citoyen cinglant, des millions d’Espagnols ont dit leur dégoût du cynisme fait politique. Trop c’était trop. Car M. Aznar et ses acolytes n’en étaient pas à leur coup d’essai. Outre les grossiers mensonges du « camp de la guerre » pour justifier l’invasion de l’Irak, ce gouvernement s’était fait le champion des anathèmes lancés en guise de débat public et de la criminalisation des mouvements sociaux. On se souvient ainsi des faux casseurs (et vrais policiers) qui avaient sévi à Barcelone, en 2001, lors de mobilisations altermondialistes. Ou encore de l’utilisation éhontée des forfaits de l’ETA pour faire adopter les lois les plus liberticides d’Europe.

Autre symptôme du caractère antidémocratique de cette droite héritière en ligne directe du franquisme - le Parti populaire a été fondé par un ex-ministre de Franco : la mainmise obscène du gouvernement sur les médias publics ou contrôlés par des affidés. Ceux qui ont vu, ces dernières années, un téléjournal de la chaîne publique pouvaient se croire revenus au temps du Généralissime.

Pourquoi reparler aujourd’hui de ces méfaits ? Simplement pour saisir la nature profonde du sursaut qui a éjecté Aznar du Palais de la Moncloa. Si les électeurs ont élu José Luis Rodriguez Zapatero, c’est avant tout dans un geste de salubrité publique. Ce qu’ils attendent du futur premier ministre, c’est qu’il les réconcilie avec la chose publique, avec une forme de morale politique.

Or, en la matière, les socialistes ont aussi un sérieux passif. Les scandales financiers et le terrorisme d’Etat qui ont marqué la fin de règne de l’ancien premier ministre Felipe Gonzalez sont encore dans toutes les mémoires...

M. Zapatero est attendu au tournant. Ses promesses de retirer l’Espagne d’Irak et, plus largement, du camp de George W. Bush devront impérativement être suivies d’actes. Ses premières déclarations vont dans le bon sens, mais les millions d’Espagnols qui se sont opposés des mois durant à la guerre ne se contenteront pas de paroles. A défaut, sa légitimité serait anéantie et sa qualité « d’élu par défaut » plongerait le pays dans une profonde crise politique et sociale.

De même, sur les questions basque et catalane, M. Zapatero devra éviter la tentation souvent irrésistible pour Madrid de jouer la carte d’un nationalisme castillan déguisé en lutte antiterroriste...

Reste la question sociale et notamment les millions de jeunes working poors sacrifiés sur l’autel de la libre entreprise. Là, malheureusement, il y a peu à attendre des actuels leaders socialistes, plus proches de Tony Blair que de Rosa Luxembourg. Si la génération des « contrats poubelles » entend sortir de sa précarité, elle devra le gagner dans la rue. Contre son gouvernement.

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