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19 juin 2012

Espagne : L’évaluation de la dette des banques bute sur l’independence

par Alfredo Serrano Mancilla *

 

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La nouvelle date limite est ce prochain solstice. Les « consultants indépendants salariés » (oui, j’accepte qu’il y ait une contradiction dans ce binôme, « indépendant » et « salarié ») par le gouvernement espagnol devront donner une valeur qui appréhende à quel point le système financier espagnol est coulé. L’obsession pour les chiffres est chaque fois plus grande. Les économistes orthodoxes, étranglés par l’économie néoclassique, sont incapables d’aborder les problèmes économico-sociaux sans utiliser de modèles mathématiques.

Au-delà de leur nécessité, les mathématiques – et les chiffres en particulier – sont utilisés par l’économie dominante exclusivement pour éviter les difficultés propres au fait d’affronter des problèmes complexes. La société, basée sur la technique, est réduite à des chiffres et tout est traduit en termes chrématistiques [1] et monétaires. Le développement se mesure à travers du Produit intérieur brut (PIB), le développement humain est un indicateur quantitatif qui prend en compte seulement l’espérance de vie, l’alphabétisation et le PIB, la pollution est possible grâce au paiement de dollars, les intentions de la population se mesurent par l’index d’expectatives économiques et un pays est uniquement la valeur de la prime de risque. Les évaluations sont toutes réalisées à partir de chiffres. Les explications sont des instruments mathématiques, et la technique est employée au nom de la neutralité et du postpolitique. Tout cela, un jeu pour enfants, de chiffres-mathématiques-techniques-, est ancré à son tour dans un autre grand commandement, l’indépendance.

Au début des années 80, le néolibéralisme a constitué une proposition hégémonique pour continuer de favoriser le taux de profit des grandes fortunes. Ce que les explications dominantes désignaient comme crise n’était que les effets néfastes sur la majorité de la réponse des pouvoirs économiques devant une chute remarquable de ses taux de profits pendant les années 70. La crise n’est la cause de rien du tout, elle est seulement la conséquence de mesures prises pour cette structure qui monopolise les décisions. Le grand capital avait besoin, à nouveau, d’une proposition économico-social-culturelle qui réussissait à ordonner le monde en faveur de ses propres intérêts. Le récit a été construit à partir des dogmes grandiloquents qui remplaçaient les vraies intentions des pouvoirs économiques. Modernisation de l’État au lieu de parler de réduction de l’État au service de prébendes corporatives. Flexibilité de travail au lieu d’impulser une extermination des droits du travail. Rationalité pour obtenir que la consommation soit le chemin unique vers le bonheur. Sécurité juridique avec l’objectif de dilapider toute souveraineté qui nuisait aux intérêts de l’investissement étranger. « Humain et durable » pour adjectiver l’échec d’un développement qui ne s’est jamais entendu avec la dimension sociale ni environnementale. Libéralisation financière pour faciliter le financiarisation de l’économie avec des capitaux migrateurs en recherche de taux de rentabilités élevés sans engagement avec l’économie réelle. Libéralisation du commerce pour permettre que les grandes transnationales puissent exporter des produits subventionnés. Valeur ajoutée pour transnationaliser les chaînes productives de valeur. Le mot marché pour veiller à l’anonymat et à la « marsianisation  » des propriétaires du monde. Et, enfin, autre grand commandement, l’allégation à l’Indépendance. Indépendance académique, indépendance des médias, indépendance de la Justice, indépendance des banques centrales. Et en ce moment, indépendance des consultants internationaux pour établir une évaluation sur les nécessités de la banque en Espagne.

L’adjectif « indépendant » est celui qui s’applique aux deux sociétés de conseil « sous contrat », Oliver Wyman (OW) et Roland Berger (RB), la première étasunienne et la deuxième allemande. La société de conseil OW a eu un rôle très actif sur le marché des hypothèques pourries aux États-Unis quand il a conseillé la Citigroup d’entrer dans ce casino à haut risque. Ensuite , le géant financier a été sauvé pour 50.000 millions de dollars. L’indépendant OW s’est aussi fait remarquer par sa vision juste de ses évaluations quand, en 2006, dans un document publié pendant la réunion du Forum Économique Mondial de Davos, il a considéré que l’Anglo Irish Bank était la meilleure banque du monde. Ensuite, cette banque a été, aussi, sauvée pour 25.000 millions d’euros. Pour sa part, la société d’évaluation RB a une implication élevée avec l’actuel gouvernement allemand et elle s’est engagée politiquement, par exemple en signant un document en faveur du fait que la Banque Centrale Européenne n’achète pas de bons. Cette société de conseil est aussi candidate pour créer une agence de qualification européenne de risque, curieusement financée par une association d’institutions financières.

L’autre organisme international, exemple d’indépendance, de technique et de neutralité, est le FMI, qui a déjà mis des chiffres au gouffre financier espagnol, 40.000 millions d’euros. Les premières informations tournent autour de 70.000 millions d’euros somme calculée par OW et RB. L’actuel sauvetage accordé a comme valeur maximale 100.000 millions d’euros. Qu’est-ce que cela peut faire 50.000 milliards de plus ou de moins ! Au contraire, aucune société de conseil indépendant, ni organisations internationales, et encore moins le gouvernement espagnol, s’inquiètent de quantifier (et qualifier) les besoins de la majorité de la population espagnole. Comme tous le savent, les chiffres aux mains de ces agents indépendants sont toujours techniques, neutres et impartiaux. Le pouvoir, à nouveau un code numérique, le G-20, sera celui qui réalise les prochaines évaluations indépendantes.

* Docteur en Économie, et coordonnateur Amérique Latine la Fondation CEPS.

Página 12. Buenos Aires, le 19 juin 2012.

Traduit de l’espagnol pour El Correo par : Estelle et Carlos Debiasi

El Correo. Paris, le 19 juin 2012.

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Notes

[1Qui se rapporte à la production des richesses.

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