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29 novembre 2004

Uruguay : Les vendeurs d’eau dans le tierce monde bientôt mis à la porte ?

 

Depuis le 31 octobre, la Constitution uruguayenne interdit l’octroi de concessions d’eau à des opérateurs privés. Première mondiale.

Par Simon Petite
Suisse, le Jeudi 18 Novembre 2004

Le 31 octobre, le même jour qu’ils portaient au pouvoir Tabaré Vazquez, les électeurs uruguayens se sont prononcés par référendum contre l’octroi de toute concession d’eau à des opérateurs privés. La nouvelle a été éclipsée par l’élection du premier président de gauche de l’histoire du petit pays sud-américain. Pourtant, l’amendement approuvé par presque 65% des votants est une première mondiale. « La Constitution prévoit désormais que l’accès à l’eau potable constitue un droit fondamental, dont la réalisation ne peut pas être assurée par des entités privées », annonce, triomphant, Alberto Villarreal. Reste à concrétiser dans une loi le fameux amendement. L’objet d’un vif débat. Pour le coordinateur des Amis de la terre en Uruguay, qui donnera une conférence vendredi soir à Genève[1], les compagnies devront partir.

Le Courrier : Concrètement, que va changer l’amendement constitutionnel ?
 Alberto Villarreal :
Depuis cinquante ans, les pouvoirs publics ont toujours fourni une eau de bonne qualité à presque toute la population. Dans ces conditions, la privatisation était absurde. Il n’y avait pas besoin d’argent frais et donc de recourir à des investissements privés. La Constitution dit maintenant que l’eau ne peut être distribuée que par le gouvernement. En clair, les deux entreprises qui ont obtenu des concessions et fournissent de l’eau à presque 5% des Uruguayens opèrent en contradiction avec la loi.

Durant sa campagne, Tabaré Vazquez a souligné que la réforme n’aurait pas d’effet rétroactif.
 Il l’a dit lors d’une visite en Espagne. Et pour cause, l’une des deux compagnies est espagnole, l’autre étant une filiale de la française Suez-Lyonnaise des Eaux. Mais l’amendement constitutionnel est très clair. L’actuel gouvernement -en charge des affaires courantes jusqu’au 1er mars, date de l’entrée en fonction de M. Vazquez- semble l’avoir compris. Il a déjà pris des contacts avec les deux entreprises pour arranger leur départ du pays.
Ces dernières ont d’ores et déjà menacé de porter le litige devant un panel international. L’Uruguay a en effet signé des accords bilatéraux avec la France et l’Espagne, qui prévoient des garanties aux investisseurs. La Constitution ne prévoit que des réparations pour les investissements pas encore amortis, mais en aucun cas pour le manque à gagner sur les profits escomptés. Cela promet une belle bataille.

Quelles étaient les performances des deux entreprises concessionnaires ?
 L’ancien ministre de l’Economie était à deux doigts de signer un décret pour que l’Etat reprenne les services de l’une des deux entreprises. Celle-ci ne payait pas sa concession, préférant renégocier les montants. Les investissements promis, en termes d’extension du réseau ou d’épuration, ne se sont jamais matérialisés. Les prix imposés aux utilisateurs se montaient à 30 dollars par mois. Dix fois plus que dans le public. Je parle du tarif fixe, c’est-à-dire lorsqu’on n’a pas encore ouvert le robinet. On coupait l’eau aux ménages en défaut de paiement. Les Uruguayens qui ont un emploi gagnent 100 dollars par mois.
 »En prenant pied dans notre pays, je crois que les entreprises pensaient plus aux énormes ressources d’eau du sous-sol uruguayen. L’aquifère de Guarani -qui s’étend aussi sous le Brésil et l’Argentine- est peut-être la plus grande réserve d’eau du monde. Alors que le marché uruguayen avec ses 3 millions d’habitants reste limité.

L’Uruguay fera-t-il des émules ?
 L’issue du litige qui s’annonce entre l’Uruguay et les compagnies se déclarant lésées constituera un précédent. Quelle norme l’emportera ? Les traités bilatéraux garantissant les droits des investisseurs ou l’amendement constitutionnel voté par un pays souverain ?

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