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26 mai 2015

Rompre avec la fausse gauche, condition du changement en Europe

Ada Colau**, Podemos et le modèle Grenoble

par Rafael Poch de Feliu*

 

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Une clé de la victoire de la gauche est de rompre sans complexes avec cette social-démocratie dégénérée qui pratique, depuis des décennies, le programme néolibéral de la grande inégalité en Europe. Il n’y a rien électoralement de plus démobilisateur et toxique qu’être le compagnon de route de cette gauche qui ne se distingue en rien d’essentiel de la droite.

Syriza a gagné parce qu’il a rompu avec eux. Podemos, comme pseudonyme d’une régénération politique ibérique bigarrée, progresse, et pourrait gagner des élections générales pour suivre la même règle, mais c’est en France où le changement d’attitude vers les « socialistes » est plus important et compliqué.

Important parce qu’à la différence de la Grèce, un petit pays, et de l’Espagne, un pays grand mais périphérique dans le concert européen, la France est une puissance centrale. Un changement au sens populaire de la politique française, lié à ce qui se passe déjà en Grèce et en Espagne, et ce qu’il peut se passer en Irlande et au Portugal, casserait l’épine dorsale du courant régressif de Bruxelles et de Berlin qui porte l’Union Européenne vers les récifs.

Difficile, parce que ni la corruption, ni le discrédit des institutions, sont mis en cause en France comme en Grèce ou en Espagne. Dans la culture politique de « gauche » il y a une inertie fatale de faux « front populaire » compris comme la somme du Parti socialiste avec le spectre de la gauche réelle, celle-ci demeurant toujours condamnée, dans le meilleur des cas, au rôle de figurant. C’est pourquoi le « modèle Grenoble » mérite tant d’attention.

Depuis un peu plus d’un an, une coalition d’écologistes et de la gauche, a présenté son candidat, Éric Piolle, à la tête de la candidature « Grenoble une ville pour Tous » et a arraché la mairie de cette grande ville de plus de 150 000 habitants à un maire socialiste. Il a été démontré à une échelle locale qu’avec un bon leader et un programme qui fait appel aux intérêts de la majorité sociale, on peut introduire une autre façon de fonctionner.

Éric Piolle est un catholique-humaniste très introduit dans le monde associatif qui travaillait comme dirigeant de la multinationale Hewlett-Packard et qui a été licencié pour refuser d’appliquer un plan de délocalisation. Comme Tsipras et les personnages qui surgissent en Espagne, Piolle a su unir dans le même pari au parti vert EELV - normalement dans l’orbite du PS - la gauche anticapitaliste, les alternatifs, diverses associations citoyennes et le Parti de gauche.

Jean-Luc Mélenchon, qui est obsédé par le modèle Podemos, c’est-à-dire faire appel aux intérêts de la majorité sociale en rompant sans complexes avec les socialistes, contemple le cas du Grenoble avec un grand intérêt. Le problème est que les verts d’EELV au niveau national et quelques communistes, continuent respectivement d’être fascinés par la possibilité d‘entrer au gouvernement ou obsédés par « faire le jeu à la droite » s’ils rompent avec le hollandisme.

Ce qui peut exister de sain dans le PS/PSOE/Pasok, s’il en reste encore quelque chose, peut être toujours récupéré depuis une position de force de la nouvelle gauche, comme celle qui existe maintenant à Athènes, à Madrid ou à Barcelone, mais jamais en étant comparse de politiques néolibérales déguisées en un poing levé et une rose . C’est, semble t-il, la leçon qu’indique le lent processus de réveil européen.

Rafael Poch pour La Vanguardia

La Vanguardia. Barcelone, 25 mai 2015.

* Rafael Poch, Rafael Poch-de-Feliu (Barcelone, 1956) a été vingt ans correspondant de « La Vanguardia » à Moscou et à Pékin. Avant il a étudié l’Histoire contemporaine à Barcelone et à Berlin-Ouest, il a été correspondant en Espagne du « Die Tageszeitung », rédacteur de l’agence allemande de presse « DPA » à Hambourg et correspondant itinérant en Europe de l’Est (1983 à 1987). Actuellement correspondant de « La Vanguardia » à Paris.
** Ada Colau, représente la coalition électorale Barcelona en Comú (BComú) qui comprend : Iniciativa per Catalunya Verds, Esquerra Unida i Alternativa, Equo, Procés Constituent a Catalunya, Podemos et la plataforme Guanyem.

Traduit de l’espagnol pour El Correo par : Estelle et Carlos Debiasi

El Correo. Paris, le 26 mai 2015.

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