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22 novembre 2013

Les universités grecques en route vers le collapse

par Antonio Cuesta *

 

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Je ne révèle rien en disant que le gouvernement grec n’a aucune marge de manœuvre et qu’il peut seulement limiter ce que les créanciers exigent. Le grave conflit ouvert dans l’université publique est un clair exemple que les ministres sont des marionnettes , sans aucune consistance ni pouvoir.

Après 11 semaines de grève des fonctionnaires, le ministre de l’éducation, Konstantinos Arvanitopulos, n’a pas été capable de se mouiller ni encore moins de chercher des solutions aux quelque 1 400 licenciements, qui représentent 40 % du personnel non enseignant dans les universités publiques. Sa litanie, « tout est déjà dit, on ne peut pas faire autre chose », a seulement empiré la situation et son unique recours pour essayer de faire plier les grévistes est la criminalisation et la répression du mouvement.

Cependant,ni le rapport du Conseil d’État [Lire : « Le Haut Tribunal grec considère les licenciements dans les universités d’intérêt public »] ni deux décisions de tribunaux de première instance ont permis que les travailleurs reviennent à leurs postes ou, au moins, permettent aux universités de franchir le pas pour que débute un cours, dont le premier semestre va être probablement perdu.

Pas plus, la menace de remplir le campus de policiers, n’a pas donné le résultat espéré, bien au contraire, la mesure a motivé lundi la démission en bloc du conseil de gouvernement de l’Université d’Athènes, tandis que l’assemblée des professeurs s’est refusé à faire cours si la ’normalité’ devait être imposée par des coups de matraques et du gaz.

Le porte-parole de l’Assemblée, Valsamis Valsamakis, a accusé le ministère d’avoir mené la situation dans une impasse. Dans sa lettre de démission, destinée au Recteur, il s’expliquait que tant le personnel enseignant, qu’administratif et les étudiants se trouvaient disposés à remplir normalement la mission assignée à l’institution éducative, cependant les mesures adoptées par le ministère rendaient cela légalement et éthiquement impossible.

Compte tenu de la situation, « extrêmement critique » et ingouvernable, une réunion avec le Premier ministre, Antonis Samarás, et avec le vice-premier ministre, Evangelos Venizelos, a été demandée « pour briser l’enlisement qui a été créé à l’Université et qui conduit à l’impossibilité de remplir toutes ses fonctions ». La réponse du gouvernement, comme il fallait s’y attendre, a été le silence le plus étourdissant.

Mardi le ministère a présenté les listes de futurs licenciés, mais recteurs, doyens et administratifs dénoncent qu’elles sont remplies de graves omissions et erreurs. A la pétition pour une révision ou, mieux encore, une réunion, pour mettre au clair les systèmes de barèmes et les critères retenus, il a été de nouveau répondu par le silence.

Comme l’a dénoncé le vice-recteur de l’Université Technique Nationale d’Athènes, Tonia Moropulu, au moins 30 personnes qui ont présenté leurs données conformément à la demandent n’apparaissent pas. Tandis que le doyen de la faculté de Droit de l’Université d’Athènes, Theodoros Fortsakis, se demande comment on peut virer 13 des 17 administratifs dont dispose la faculté, et chercher à la conserver ouverte et en fonctionnement.

Le même jour, à Thessalonique, une employée de l’Université d’Aristotelês a essayé de se suicider après avoir vu que son nom se trouvait dans la liste des licenciés, et seule la rapide mobilisation de ses collègues a évité un dénouement fatal. Le doyen Yianis Mylopulos a assuré qu’ « il est nécessaire que nous arrêtions ce processus ici, la communauté universitaire requiert de s’arrêter là ».

Silence, silence, silence

Les travailleurs ont poursuivi leur grève, bloquant les accès aux édifices, appuyés par un bon nombre d’étudiants qui occupent de nombreux départements. Le Recteur de l’Université d’Athènes, Theodosis Pelegrinis, a continué de demander en vain une réunion avec le ministre. Les uniques déclarations d’Arvanitopulos ont été faites par radio, pour dire « avoir épuisé les possibilités » et pour exiger du recteur et des autorités universitaires « de faire tout ce qui est à leur portée pour ouvrir les universités ». Le ministre a repoussé toute mesure de dialogue puisque « dans les limitations et les besoins du pays », à propos des licenciements qui ont été imposés par les créanciers étrangers, « nous avons fait tout ce que nous avons pu pour maintenir les universités ouvertes ».

Devant la situation de chaos, le principal parti d’opposition de gauche, Syriza, a accusé le ministère de maintenir « une attitude politiquement dangereuse et irresponsable  » et a demandé le retrait des licenciements puisqu’ ils mènent seulement « l’éducation, la recherche et les universités au collapsus ».

À son tour, le Parti Communiste de la Grèce a publié une note brève pour apporter son soutien à « la juste lutte des administrateurs contre les licenciements et l’autoritarisme du gouvernement » et dénoncer les plans de l’exécutif pour privatiser l’université publique pour « la rendre inaccessible aux enfants de travailleurs et subordonner son fonctionnement aux besoins du capital ».

Pour essayer d’en finir avec la posture immobile du gouvernement, mercredi se tenait le conseil de gouvernement de l’Université Aristotelês de Thessalonique qui a décidé de présenter sa démission de forme collective. Pendant ce temps de nouvelles universités rejoignent la grève.

Dans son communiqué de démission les dirigeants ont dénoncé la responsabilité de l’État et du ministère de ne pas vouloir résoudre la grave crise dans laquelle se trouvent les universités publiques qui, avec près de 40% de moins de personnel administratif, pourront seulement procéder à leur dissolution. Ils ont ajouté que « le retrait de la majorité, et la plus qualifiée, des fonctionnaires du service d’Administration et de Finances, et du Comité de recherche de l’Université Aristotelês » mènera à des problèmes insurmontables dans la gestion financière et autre. Et pour cela ils ont demandé au gouvernement le retrait du programme de licenciements. Une fois encore ils se sont trouvés face un mur de silence.

La semaine finit comme elle a commencé avec les universités fermées, le personnel en grève et le gouvernement faisant pression sur la justice, une fois assumé le fiasco de vouloir utiliser la police pour casser la grève. Devant le refus du gouvernement de ne pas faire de concession, la solution continue à s’éloigner, et la brèche continue à s’ouvrir avec des conséquences imprévisibles.

Antonio Cuesta pour son Cuaderno de Atenas

Cuaderno de Atenas. Athènes, le 20 novembre 2013

* Antonio Cuesta est correspondant de l’Agence Prensa Latina en Grèce. Son blog est : Un cahier d’Athènes

Traduit de l’espagnol pour El Correo par : Estelle et Carlos Debiasi

El Correo. Paris, le 22 novembre 2013.

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