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L’emploi de la métaphore médico-chirurgicale dans le discours militaire de la « Guerre révolutionnaire » est cohérent sur le plan rhétorique. Il exprime tant une modernisation desauto-représentations du professionnel de la violence légitime que sa volonté d’intervention dans lasphère du politique et du social.
Le militaire, professionnel de la violence légitime, possède un langage, un discours, qui est propre à son champ, à ses compétences techniques spécifiques. Ce langage est, logiquement, présent dans tous les textes afférents à la théorie et à la pratique du métier des armes. Cependant, face aux réalités mouvantes de l’histoire, dont l’homme de guerre est souvent l’un des protagonistes principaux, mots, termes et vocabulaires conventionnels ne suffisent pas ou plus. L’emprunt d’autres formules, raffinement des concepts pour orienter l’action s’imposent.
Analogies et métaphores peuvent alors venir au secours du soldat. Elles apparaissent autant comme des instruments destinés à analyser et illustrer des réalités nouvelles que comme l’expression même des modifications indispensables à l’accomplissement efficace d’une mission. Des exemples de ce type de situation nous sont donnés par l’utilisation récurrente de tropes métaphoriques d’une catégorie particulière, dans des textes en rapport avec la doctrine de la guerre révolutionnaire (DGR) [1] ou avec ses dérivés, les concepts de guerre subversive [2] et de stratégie indirecte [3]. En effet, dans ce corpus doctrinal très large, qui se déploie depuis les conclusions tirées de la guerre d’Indochine jusqu’aux écrits théoriques traitant de la guerre froide, émerge une forme spécifique de métaphore : la métaphore médico-chirurgicale (MMC). A titre d’illustration, citons un extrait du rapport « Enseignement de la guerre d’Indochine », édité en 1955 par le commandement en chef en Extrême-Orient, dans lequel on peut lire :
Gabriel Périès*, Persée. Paris, mars1991
[1] Voir, pour informations sur le concept, P. Paret, French revolutionary warfare front Indochina to Algeria, New York, Washington, Londres, F. A. Praeger, 1964.
[2] R. Girardet, « Reflexions critiques sur la doctrine militaire française de la guerre subversive », Revue des travaux de l’Académie des sciences morales et politiques, 1er semestre 1960, p. 232.
[3] Voir, Général Beaufre, Stratégie de l’action, Paris, A. Colin, 1966
[4] Nous soulignons dorénavant tout trait caractéristique porteur de MMC.
[5] Commandement en chef en Extrême-Orient, « Enseignements de la guerre d’Indochine », fasc. II, 1955, p. 47
[6] Général Beaufre, Stratégie de l’action, op. cit., 1966
[7] G. Périès, « Doctrine de la sécurité nationale et national-catholicisme, deux sources théoriques du Processus de réorganisation nationale en Argentine (1976- 1983) », DEA, Université de Paris I, 1986, p. 112.