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19 novembre 2004

La démocratie de l’eau : L’eau sera un "bien public" et ne sera pas privatisée

par Iñigo Herraiz

 

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Le fait qu’un pays comme l’Uruguay élise pour la première fois de son histoire un gouvernement de gauche après 170 ans d’alternance entre les partis « blancos » (conservateurs) et « colorados » (libéraux) est notable mais il est peut-être plus important encore de noter le caractère pionnier de l’organisation d’un référendum sur l’eau marqué par le refus de la privatisation de celle-ci. Plus de 60% des citoyens ont voté en faveur d’une réforme de la Constitution qui déclare l’eau comme « bien public » et l’empêche de ce fait de tomber entre les mains du secteur privé et en même temps garantit la participation des usagers à tous les niveaux de sa gestion. L’accès aux services d’eau et d’assainissement devient de ce fait un droit humain fondamental et une société d’état se charge de rendre ce droit effectif évitant ainsi dans le futur de nouvelles concessions à des entreprises privées. Les organisations écologistes ont souligné l’importance de l’initiative uruguayenne dans sa nouveauté et aussi parce qu’elle représente un précédent important pour la protection de l’environnement : la démocratie directe comme méthode pour consacrer ces principes dans la Constitution nationale. A une époque où les grandes multinationales livrent bataille pour le contrôle de l’eau, l’Uruguay garantit ainsi la souveraineté sur une ressource à laquelle la rareté confère chaque fois plus de prix. Un point qui n’est pas encore très clair avec la réforme est ce qui va se produire avec les entreprises étrangères qui, actuellement, prêtent des services dans le pays dans le secteur de l’eau. En principe, la réforme n’aura pas un caractère rétroactif et on ne révisera que les concessions qui vont à l’encontre de l’intérêt général. C’est le cas avec deux sociétés espagnoles. Aguas de la Costa opère dans le département de Maldonado depuis douze ans. Depuis lors, les tarifs dans la zone ont augmenté à un rythme 7 fois supérieur au reste du pays. C’est un phénomène lié à toute expérience de privatisation que les entreprises ont l’habitude de justifier en disant qu’elles améliorent le service. Mais l’exemple de l’autre société espagnole contredit cet argument. Uruagua se charge de la fourniture d’eau à Punta del Este et Piri, deux centres touristiques renommés. Au plus haut point de la fréquentation touristique, la compagnie publique d’eau (OSE) a été obligée de recommander à la population de faire bouillir l’eau fournie par Uruagua avant de la consommer car elle contenait des bactéries. Ces dernières années, le transfert au secteur privé de la gestion de l’eau a été présenté comme une solution possible à sa raréfaction croissante. La Banque mondiale a été un des principaux parrains de cette idée, et a même dans certains cas, été jusqu’à conditionner la concession de prêts dans les pays du Sud à la privatisation de l’eau et de l’assainissement. Certaines sociétés comme Suez Lyonnaise des Eaux ou Vivendi ont déjà 110 millions de clients dans 100 pays et aspirent à accaparer 75% du marché dans les prochaines années.

Plusieurs pays latino-américains se sont déjà opposés fermement à la privatisation de l’eau. Les habitants de Cochabamba en Bolivie ont été à l’origine d’une révolte qui a fait beaucoup de bruit. Excédés par le fait de devoir consacrer près de la moitié de leur salaire dans leur facture d’eau, ils sont sortis dans les rues. Après des mois de protestations, ils ont réussi à récupérer le contrôle de la précieuse ressource et à obliger le gouvernement à suspendre la concession à une entreprise dépendante du conglomérat Bechtel. Dans d’autres pays de la région, comme l’Argentine et le Chili, la privatisation a soulevé un malaise chez les gens mais aucun pays auparavant n’a fait ce qu’a fait l’Uruguay à savoir soumettre au vote le mode de gestion de l’eau. Il faudra voir si son exemple se propage.

AIS, 4 novembre 2004

Traduction : RISAL (Virginie de Romanet)

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