recherche

Accueil > Réflexions et travaux > Dédollariser, déeuroiser Notre Amérique

19 juin 2011

Dédollariser, déeuroiser Notre Amérique

par Raúl Dellatorre

 

Toutes les versions de cet article : [Español] [français]

À mesure que se succèdent les événements autour de la crise de la Grèce, grandit la sensation que les pays leaders d’Occident manquent de réponse pour résoudre le phénoménal désordre financier mondial qu’ a apporté le néo-libéralisme.

La dernière tentative des plus hauts dirigeants européens, la chancelière allemande Angela Merkel et le président de la France Nicolas Sarkozy, est presque un jeu de simulation prétendant dire que rien ne ce passe quand tout éclate. Devant la faillite inévitable à laquelle la Grèce a été amenée après un an de politiques d’ajustement qui l’ ont encore affaibli plus encore par rapport à sa capacité de paiement, maintenant la solution imaginée est que les créanciers se présentent « volontairement » pour échanger leurs obligations à terme par d’autres à plus long terme. Comme si le business de représenter le débiteur insolvable les tentait. Mais pour Merkel et Sarkozy, c’est mieux (et différent) que dire publiquement que le débiteur est dans l’incapacité de payer et qu’il n’y a pas d’autre sortie que l’échange de la dette, formule avec d’ excessives connotations latinoaméricaines.

Depuis ce côté du monde, le pire qui pourrait arriver serait de rester voir avec satisfaction comment tombe l’ Europe pour avoir insister dans les politiques qui ont plongé auparavant l’Amérique Latine. Et auxquelles la région a survécu quand elle a abandonné les paradigmes qu’imposaient le FMI et le Consensus de Washington. Avec ce degré d’autosatisfaction, on serait en train d’ignorer ou on cesserait de voir que, derrière ce qui arrive aujourd’hui en Europe, couve un nouveau tour de la crise internationale. Et qu’avoir supportée relativement légèrement dans sa première édition (2008/2009) n’implique pas nécessairement la garantie qu’il en sera de même maintenant. Ni l’Argentine ni le reste d’Amérique Latine ont aujourd’hui un degré d’indépendance, de non relation (« de déconnexion », dirait l’économiste égyptien Samir Amin) qui leur assurent ne pas se voir affectées par une crise qui aujourd’hui comprend des pays qui représentent 70 pour cent du produit national brut mondial (Union Européenne plus les Etats-Unis, plus le Japon).

Tandis que Merkel insiste sur la formule dont la Grèce doit prendre la charge avec tous les coûts de la crise, en payant par une rigueur interne les conséquences, elle réussit à retarder seulement le dénouement selon lequel les créanciers aussi, dans ce cas fondamentalement des banques et des investisseurs français et allemands, reçoivent le coup de bâton. Le système de l’euro marche vers cette crise. Du côté des États-Unis, cependant, chaque fois il a un plus grand consensus, le diagnostic selon lequel l’économie principale du monde non seulement ne montre pas avoir laissé derrière la crise, mais qu’elle a rapidement ralenti, avec le pronostic d’aller vers une nouvelle phase de récession. De plus, pour le chef de la Réserve fédérale il est de plus en plus difficile d’obtenir l’autorisation du Congrès pour augmenter la limite d’endettement. Le dollar, comme monnaie mondiale, et les bons du Trésor US, comme actif de réserve mondiale, traversent un discrédit inédit.

Si les deux principales monnaies mondiales sont dans un net processus de détérioration : comment feront les pays en développement pour ne pas rester liés à des éventuelles catastrophes ? Pour les pays de l’Amérique du Sud, en particulier pour les 12 membres de l’Unasur, il y a eu une bonne tentative de réponse il y a dix jours, quand à Buenos Aires fut discutée la nécessité d’articuler les politiques monétaires entre les associés de la région et d’avancer dans la construction de la banque du Sud comme instrument autonome de financement, dans la coordination dans l’usage des réserves internationales et dans la promotion du commerce en monnaies locales au lieu du dollar. Mais à ces intéressantes propositions manquent encore d’une condition fondamentale : la décision politique de les mettre en pratique.

L’ Argentine, à côté du Brésil principalement, a introduit dans des forums internationaux la discussion sur l’illégitimité des politiques d’ajustement (que, cependant, l’Union Européenne continue d’appliquer) et la mise en question des fonds spéculatifs (protégés, dans de nombreux cas, par les États-Unis) qui ont imprimé une volatilité nuisible aux prix des matières premières. Ce n’est pas un hasard que les principales puissances occidentales sont engagées dans ces instruments bâtards de l’économie, parce que cela continuent d’être les armes les plus pratiques qu’elles ont sous la main pour faire payer aux autres le coût de la vaisselle cassée. Dénoncer ces pratiques à chaque réunion du Groupe de 20 ou dans d’autres forums internationaux n’est pas de trop, mais ce serait mal de se faire trop d’illusions sur l’apparition d’une réponse positive.

Dans un article récent, Julio Gambina (économiste, président de FISyP) remarquait que la crise, comme l’économie, a un caractère mondial, englobe l’ensemble du système. Mais les politiques économiques en réponse sont nationales, ont une portée locale. Cette « contradiction » est l’un des aspects à prendre en compte pour analyser les réponses les plus adéquates mais pensées et appliquées globalement par des pays avec des intérêts communs dans une région.

La Grèce est poussée pour tomber bientôt de la table. Mais elle s’accroche à la nappe, qu’elle emportera avec elle. Sur cette nappe, se trouve l’économie mondiale, nous y sommes tous.

Página 12 Buenos Aires, le 19 juin 2011

Traduit de l’espagnol pour El Correo par Carlos et Estelle Debiasi

Contrat Creative Commons
Cette création par http://www.elcorreo.eu.org est mise à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 3.0 Unported.

Retour en haut de la page

El Correo

|

Patte blanche

|

Plan du site