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15 juin 2018

[Conscience] Argentina 1 - Israël 0

par José Steinsleger *

 

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Avec le refus de la sélection argentine de jouer une rencontre amicale de football sur les tombes palestiniennes de Jérusalem, l’équipe dirigée par Jorge Sampaoli a déjà gagné le Mundial. Le mundial de la conscience et de la dignité.

Fleur d’un jour parmi les médias alignés sur le récit sioniste, la nouvelle résonna dans les rangs des supporters de la planète. Cependant, après avoir été surpris hors-jeu, le perdant a choisi de lancer une contre-attaque pathétique, laissant en évidence son hypocrisie et - sa perversité.

L’attaquant Gonzalo Higuaín, a dit cinq mots : « Lo correcto era no ir » (La correction était de ne pas y aller). Cela ne pouvait pas être autrement . Parce que pour le 70ième anniversaire de la Nakba (génocide du peuple palestinien), son équipe a senti que jouer à Jérusalem était une manière de légitimer la criminelle judaïsation de la Ville sainte.

A Buenos Aires, l’ambassadeur de Tel Aviv, Ilan Sztulman, a commenté la décision historique avec cinq autres mots : "Los jugadores argentinos tuvieron miedo" (Les joueurs argentins ont eu peur). Et il a parlé des menaces terroristes. En omettant, naturellement, le massacre récent perpétré par les Forces de Défense (sic) de son pays dans la bande de Gaza (135 morts, 14 700 blessés).

La rencontre/sans rencontre entre Israël et l’Argentine a été d’un classique authentique. Puisque tout ce qui était relatif à Israël s’est converti en synonyme de peur. Comme l’a bien rappelé le Chilien Nicola Hadwa (ex-entraîneur de la sélection palestinienne), sept des meilleurs joueurs de son équipe furent assassinés pendant l’invasion de Gaza, en 2014.

Comment ne pas avoir de peur, alors, quand dans la récente Grande Marche pour le Retour, sont morts assassinés Ayman Alkurdm, de la sélection palestinienne, subissant le même sort que Wajeh Moshtahe et Shadi Sbakhe, en plus de Khalil Abed Jaber, du Comité Olympique Palestinien ?

Fais le compte et suit. Comment ne pas avoir peur en face d’un régime d’occupation qui vit en se victimisant, et qui seulement parce qu’ils jouaient au ballon sur une plage de Gaza, a assassiné en 2014 quatre enfants de 10 et 11 ans ? Comment, de ne pas l’avoir en face du soldat israélien qui a tiré sur Mohammed Khalil (joueur de l’Al-Salah FC), parce qu’il filmait une marche pacifique, et maintenant a besoin d’une prothèse pour recommencer à marcher ?

Et avec la peur, l’injustice. Hawda rappelle qu’en 2011, quand son équipe a joué pour la première fois un éliminatoire contre l’Afghanistan, il a gagné et a passé au deuxième tour. Mais dans les jours préalables à la finale, plusieurs joueurs ont été retenus par le régime sioniste aux frontières de Gaza et de Cisjordanie et, sans la moitié de l’équipe, la Palestine a perdu la finale en Thaïlande.

À la veille du Mondial de Russie, les joueurs argentins ont élevé haut leur conscience politique et sportive. Ce qui n’a pas surgi d’un fait ponctuel comme on l’a commenté. Avec une moyenne d’âge de moins de 30 ans, ses intégrants ont grandi dans la décennie 1990, et ont gagné leurs lauriers pendant la décennie kirchnèriste.

L’époque à laquelle ils entendaient leur idole, Diego Armando Maradona, parler du génocide de la dictature civico militaire (1976-83), de la cause anticoloniale des Malouines et de l’impact des ajustements du Fonds monétaire international dans leurs familles, parents, amis. Ainsi , comme des connotations macabres du Mondial de 1978, quand l’Argentine gagna la Coupe alors qu’à quelques mètres du stade de River Plate, les avions de l’Armée jetaient vivants à la mer des milliers de militants sociaux.

Terrorisme ? Pure merde de la hasbará (propagande sioniste). Sur le même ton que les fake news et le dépit du président Mauricio Macri et du premier ministre Benjamin Netanyahu, la hasbará a accusé dans les réseaux sociaux le sélectionneur Sampaoli (ami des Mères et Grand-mères de Place de Mai), d’abus sexuel contre une employée de l’Association du Football Argentin (AFA).

Roger Waters, le fondateur de Pink Floyd, a célébré la suspension du match Israël - Argentine par le biais de son compte Twitter : Heureux ! Amour à tous nos frères et sœurs d’Argentine. Ceci pourrait être le point d’inflexion.

Simultanément, à Tel Aviv, la contre-attaque du perdant ne s’est pas non plus fait attendre. Selon le journal Haaretz, le ministre israélien de la Sécurité Publique, Gilad Erdan, a ordonné au chef du service pénitentiaire que les prisonniers palestiniens ne voient pas les matches de la Coupe du Monde. Pour cela, il a fallu modifier la loi qui leur permettait de voir la télévision.

Le monde du football est loin de briller dans des affaires de conscience et de dignité. Après tout, il s’agit d’un sport de masses qui draine des milliers de millions de dollars. Mais demain, à la cérémonie inaugurale, la sélection argentine défilera dans le stade Luzhniki de Moscou et le monde entier lu rendra une ovation spéciale, pour avoir exalté la mémoire du peuple palestinien.

Argentine 1 - Israël 0. Un grand triomphe contre les provocations du sionisme. Match amical ? Dans mon quartier, quand les garçons qui parlaient mal le français s’irritaient avec les impondérables du football, ils s’exclamaient : amical, mes couilles !

José Steinsleger * pour La Jornada

Titre original : « Argentina 1 - Israël 0 »

La Jornada. Méxique, 13 juin 2018

* José Steinsleger Ecrivant et journaliste argentin. Editorialiste de La Jornada de México. Resident au Mexique.

Traduction  : Rose-Marie LOU

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