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18 novembre 2022

Comment Larry Fink, de Blackrock, a créé la crise énergétique mondiale.

par F. William Engdahl*

 

Toutes les versions de cet article : [Español] [français]

La plupart des gens sont déconcertés par ce qu’ est une crise énergétique mondiale, les prix du pétrole, du gaz et du charbon s’envolant simultanément et forçant même la fermeture de grandes installations industrielles telles que les produits chimiques, l’aluminium ou l’acier.

L’administration Biden et l’UE ont insisté sur le fait que tout incombe à Poutine et aux actions militaires de la Russie en Ukraine. Ce n’est pas le cas. La crise énergétique est une stratégie planifiée de longue date par les milieux politiques et corporate occidentaux pour démanteler les économies industrielles au nom d’un programme vert dystopique. Cette stratégie trouve ses racines dans la période bien antérieure à février 2022, date où la Russie a lancé son action militaire en Ukraine.

Blackrock pousse l’ESG

En janvier 2020, à la veille des confinements du Covid dévastateurs sur le plan économique et social, le PDG du plus grand fonds d’investissement du monde, Larry Fink de Blackrock [« BlackRock, l’encombrante conseillère de la Commission européenne ». Le Monde », 18 avril 2020], a publié une lettre adressée à ses collègues de Wall Street et aux PDG des grands groupes sur l’avenir des flux d’investissement. Dans ce document, modestement intitulé « A Fundamental Reshaping of Finance » [Voir plus bas lettre complete en français et en anglais], M. Fink, qui gère le plus grand fonds d’investissement du monde avec quelque 7 000 milliards de dollars gérés, annonce un changement radical dans investissements corporate. L’argent allait « passer au vert ». Dans sa lettre de 2020, qui a été suivie de près, Fink a déclaré :

« Dans un avenir proche - et plus tôt que la plupart des gens ne le prévoient - il y aura une réaffectation significative du capital... Le risque climatique est un risque d’investissement ».

De plus, il a déclaré :

« Chaque gouvernement, chaque entreprise et chaque actionnaire doit faire face au changement climatique ».

Dans une lettre distincte adressée aux clients investisseurs de Blackrock, M. Fink a présenté le nouveau programme de capital investissement. Il a déclaré que Blackrock se retirerait de certains investissements à forte teneur en carbone, tels que le charbon, la principale source d’électricité aux États-Unis et dans de nombreux autres pays. Il a ajouté que Blackrock passerait au crible les nouveaux investissements dans le pétrole, le gaz et le charbon afin de déterminer leur adhésion à l’Agenda 2030 des Nations unies sur le « développement durable ».

Fink a clairement indiqué que le plus grand fonds du monde commencerait à désinvestir du pétrole, du gaz et du charbon. « Au fil du temps », a écrit Fink, « les entreprises et les gouvernements qui ne répondent pas aux parties prenantes et ne traitent pas les risques liés au développement durable se heurteront à un scepticisme croissant des marchés et, à leur tour, à un coût du capital plus élevé ». Il ajoute que « le changement climatique est devenu un facteur déterminant dans les perspectives à long terme des entreprises... nous sommes à la veille d’une refonte fondamentale de la finance ».

Dès lors, les investissements dits ESG, qui pénalisent les entreprises émettrices de CO2 comme ExxonMobil, sont devenus à la mode parmi les fonds spéculatifs, les banques de Wall Street et les fonds d’investissement, dont State Street et Vanguard. Tel est le pouvoir de Blackrock. Fink a également réussi à ce que quatre nouveaux membres du conseil d’administration d’ExxonMobil se soient engagés à mettre fin à l’activité pétrolière et gazière de la société.

La lettre de Fink de janvier 2020 était une déclaration de guerre de la grande finance contre l’industrie des énergies conventionnelles. BlackRock a été l’un des membres fondateurs de la Task Force on Climate-related Financial Disclosures (lTCFD) et est signataire des UN PRI- Principles for ResponsibleInvesting un réseau soutenu par l’ONU d’investisseurs poussant à l’investissement zéro carbone en utilisant les critères très biaisés ESG- facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance dans les décisions d’investissement. Il n’y a pas de contrôle objectif sur les fausses données ESG d’une entreprise. En outre, Blackrock a signé la déclaration du Vatican de 2019 préconisant des régimes de tarification du carbone. En 2020, BlackRock a également rejoint Climate Action 100, une coalition de près de 400 gestionnaires d’investissement gérant 40 000 milliards de dollars.

Avec cette lettre fatidique de janvier 2020, Larry Fink a déclenché un désinvestissement colossal dans le secteur mondial du pétrole et du gaz, qui représente des milliards de dollars. De plus , cette même année, Fink de BlackRock a été nommé au conseil d’administration du dystopique Forum économique mondial (WEF)[DAVOS] de Klaus Schwab, le nexus corporatif et politique de l’Agenda 2030 de l’ONU zéro carbone. En juin 2019, le Forum économique mondial et les Nations unies ont signé un cadre de partenariat stratégique pour accélérer la mise en œuvre de l’Agenda 2030. Le WEF dispose d’une plateforme d’intelligence stratégique qui comprend les 17 objectifs de développement durable de l’Agenda 2030.

Dans sa lettre aux PDG de 2021, Fink a doublé l’attaque contre le pétrole, le gaz et le charbon. « Étant donné à quel point la transition énergétique sera centrale pour les perspectives de croissance de chaque entreprise, nous demandons aux entreprises de divulguer un plan sur la façon dont leur modèle économique sera compatible avec une économie nette zéro », a écrit Fink. Un autre dirigeant de BlackRock a déclaré lors d’une récente conférence sur l’énergie que « là où BlackRock va, les autres suivront  ».

En deux ans seulement, jusqu’ à 2022, on estime que 1 000 milliards de dollars ont été retirés des investissements dans l’exploration et l’exploitation du pétrole et du gaz dans le monde. L’extraction du pétrole est une activité coûteuse et l’arrêt des investissements externes par BlackRock et d’autres investisseurs de Wall Street signifie la mort lente de l’industrie.

Biden - un président de BlackRock ?

Au début de sa candidature présidentielle alors peu reluisante, Biden a eu une réunion à huis clos fin 2019 avec Fink qui aurait dit au candidat : « Je suis là pour aider ». Après sa réunion fatidique avec Fink de BlackRock, le candidat Biden a annoncé : « Nous allons nous débarrasser des combustibles fossiles... ». En décembre 2020, avant même son investiture en janvier 2021, Biden a nommé Brian Deese, responsable mondial de l’investissement durable chez BlackRock, au poste d’assistant du président et de directeur du Conseil économique national. Ici, Deese, qui a joué un rôle clé pour Obama dans la rédaction de l’Accord de Paris sur le climat en 2015, a discrètement façonné la guerre de Biden contre l’énergie.

Cela fut catastrophique pour l’industrie pétrolière et gazière. Deese, l’homme de Fink, s’est employé à donner au nouveau président Biden une liste de mesures anti-pétrole à signer par décret dès le premier jour, en janvier 2021. Ces mesures comprenaient la fermeture de l’énorme oléoduc Keystone XL, qui acheminerait 830 000 barils par jour du Canada jusqu’aux raffineries du Texas, et l’arrêt de toute nouvelle concession dans la réserve naturelle de l’Arctique (ANWR). Biden a également réintégré l’Accord de Paris sur le climat que Deese avait négocié pour Obama en 2015 et que Trump a annulé.

Le même jour, M. Biden a déclenché une modification du « coût social du carbone », qui impose à l’industrie pétrolière et gazière la somme punitive de 51 dollars par tonne de CO2. Cette seule mesure, prise en vertu d’une autorité purement exécutive sans le consentement du Congrès, a un effet dévastateur sur les investissements dans le pétrole et le gaz aux États-Unis, un pays qui, deux ans auparavant, était le premier producteur mondial de pétrole.

Suppression de la capacité de raffinage

Pire encore, les règles environnementales agressives de Biden et les mandats d’investissement ESG de BlackRock sont en train de tuer la capacité de raffinage des États-Unis. Sans raffineries, le nombre de barils de pétrole prélevés dans la réserve stratégique de pétrole n’a aucune importance. Au cours des deux premières années de la présidence de M. Biden, les États-Unis ont fermé environ 1 million de barils par jour de capacité de raffinage d’essence et de diesel, en partie à cause de l’effondrement de la demande de pétrole, le déclin le plus rapide de l’histoire des États-Unis. Ces fermetures sont permanentes. En 2023, une capacité supplémentaire de 1,7 million de barils par jour devrait être fermée en raison du désinvestissement ESG de BlackRock et Wall Street et des réglementations de Biden.

Citant le désinvestissement massif de Wall Street dans le pétrole et les politiques anti-pétrole de Biden, le PDG de Chevron a déclaré en juin 2022 qu’il ne pensait pas que les États-Unis construiraient un jour une nouvelle raffinerie.

Larry Fink, membre du Conseil d’Administration du Forum Economique Mondial de Klaus Schwab, est rejoint par l’UE dont la présidente de la Commission Européenne, Ursula von der Leyen, notoirement biaisée, a quitté le Conseil d’Administration du WEF en 2019 pour devenir chef de la Commission Européenne. Son premier acte majeur à Bruxelles a été de faire adopter le programme européen « Zéro carbone » à horizon 2050. Cela a imposé des taxes carbone majeures et d’autres contraintes sur le pétrole, le gaz et le charbon dans l’UE bien avant les actions russes de février 2022 en Ukraine.

L’impact combiné du programme ESG frauduleux de Fink au sein de l’administration Biden et de la folie « zéro carbone » de l’UE est en train de créer la pire crise énergétique et inflationniste de l’histoire.

F. William Engdahl*

Original en anglais : «  How Blackrock’s Larry Fink Created the Global Energy Crisis  »

*F. William Engdahl est un économiste, écrivain et journaliste étasunien qui écrit sur la géopolitique, l’économie et l’énergie depuis plus de trois décennies. Il est également consultant en risques stratégiques et conférencier, est diplômé en politique de l’université de Princeton et est l’auteur de best-sellers sur le pétrole et la géopolitique.

Global Research.Canada, le16 novembre 2022

LETTRE COMPLETE
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VERS UNE TRANSFORMATION FONDAMENTALE DU SECTEUR FINANCIER

En tant que gestionnaire d’actifs, BlackRock investit pour le compte de tiers. Je m’adresse donc à vous en qualité de conseiller et agent de confiance de nos clients, envers lesquels nous avons un devoir de vigilance, de loyauté et de prudence. L’argent que nous gérons ne nous appartient pas. Il appartient aux habitants de nombreux pays, qui l’ont confié à des institutions financières, nos clients, dans le but de financer leurs objectifs de long terme comme, par exemple, la retraite. Il est dès lors de notre responsabilité envers ces institutions et ces personnes – actionnaires de votre entreprise et de milliers d’autres – de promouvoir la valeur à long terme de leurs placements.

Le changement climatique constitue désormais un facteur déterminant dans les perspectives à long terme des entreprises. En septembre dernier, lorsque des millions de personnes sont descendues dans la rue pour exiger des actes contre le changement climatique, nombre d’entre elles ont évoqué l’impact significatif et durable de ce dernier sur la croissance économique et la prospérité – un risque que les marchés, à ce jour, tardent à refléter.

Mais la prise de conscience progresse rapidement, et je suis convaincu que nous sommes à la veille d’une transformation fondamentale du secteur financier.

Les preuves des risques climatiques ont conduit les investisseurs à réévaluer les principes fondamentaux de la finance d’aujourd’hui. Les recherches menées par un large éventail d’organisations – dont le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat des Nations Unies, le BlackRock Investment Institute et bien d’autres telles que les nouvelles études menées par le cabinet de conseil McKinsey à propos des implications socio-économiques du risque climatique physique – ont permis d’approfondir notre compréhension de l’impact qu’aura le risque climatique sur notre monde, ainsi que sur le système international finançant la croissance économique.

Les villes, par exemple, seront-elles en mesure de financer leurs besoins en infrastructures alors que le risque climatique est en train de transformer le marché des obligations municipales ? Que deviendront les crédits hypothécaires à 30 ans – un outil de financement essentiel – si les prêteurs ne peuvent estimer l’impact du risque climatique sur une période aussi longue, et s’il n’existe pas de marché viable pour les assurances inondation ou incendie dans les régions touchées ? Qu’adviendra-t-il de l’inflation, et par conséquent des taux d’intérêt, si la sécheresse et les inondations poussent les prix des aliments à la hausse ? Comment modéliser la croissance économique si les marchés émergents voient leur productivité diminuer en raison d’une chaleur extrême ou d’autres conséquences climatiques ?

Les investisseurs commencent à intégrer ces questions et considèrent de plus en plus le risque climatique comme un risque d’investissement. De fait, le changement climatique arrive presque invariablement en tête des problèmes évoqués par les clients de BlackRock à travers le monde. De l’Europe à l’Australie, de l’Amérique du Sud à la Chine, de la Floride à l’Oregon, les investisseurs nous demandent comment ils devraient modifier leurs portefeuilles. Ils cherchent à comprendre les risques physiques associés au changement climatique, mais aussi les répercussions des politiques climatiques sur les prix, les coûts et la demande dans l’ensemble de l’économie.

Ces questions entraînent une réévaluation en profondeur des risques et de la valeur des actifs. Et comme les marchés de capitaux intègrent dans leurs prix le risque futur, l’allocation des capitaux subira des changements plus rapides que le climat lui-même. Dans un avenir proche, plus proche que la plupart des gens ne l’anticipent, nous observerons une réallocation significative des capitaux.

Le risque climatique est un risque d’investissement

De par notre devoir de vigilance, de loyauté et de prudence envers de nos clients, il nous appartient de les aider à traverser cette période de transition. En matière d’investissement, nous sommes convaincus que les portefeuilles intégrant le développement durable et les enjeux liés au climat peuvent offrir aux investisseurs une meilleure performance ajustée du risque. Étant donné l’impact croissant du développement durable sur la performance, nous estimons que l’investissement durable représente désormais le meilleur gage de robustesse pour les portefeuilles des clients.

Dans une lettre adressée ce jour à nos clients, BlackRock a annoncé un certain nombre d’initiatives visant à placer le développement durable au centre de notre approche d’investissement : intégrer le développement durable à la construction de portefeuille et à la gestion des risques ; liquider les investissements affichant un risque élevé en matière de durabilité, comme les participations dans les producteurs de charbon thermique ; lancer de nouveaux produits d’investissement excluant les combustibles fossiles ; enfin, renforcer notre action en faveur de la durabilité et de la transparence à travers nos activités d’engagement actionnarial.

L’un des enjeux majeurs des prochaines années concerne l’ampleur et la portée de l’action gouvernementale en matière de lutte contre le changement climatique, qui détermineront la rapidité de la transition vers une économie à faible intensité de carbone. Relever ce défi nécessitera une réponse internationale coordonnée des gouvernements, en ligne avec les objectifs des Accords de Paris.

Quel que soit le scénario, la transition énergétique s’étalera sur plusieurs décennies. Malgré les rapides progrès récents, la technologie ne permet pas pour l’instant de proposer des alternatives rentables pour remplacer beaucoup des usages essentiels de la consommation d’hydrocarbures. Nous devons être conscients des réalités économiques, scientifiques, sociales et politiques liées à la transition énergétique. Les gouvernements et le secteur privé se doivent de collaborer pour définir une transition juste et équitable. Notre progression vers un monde à faible intensité de carbone doit concerner l’ensemble de la société et ne peut se permettre d’ignorer des pays entiers, notamment ceux en voie de développement.

S’il appartient aux gouvernements de montrer la voie dans cette transition, les entreprises et les investisseurs ont également un rôle important à jouer. Assumant nos responsabilités en la matière, BlackRock a été l’un des membres fondateurs du groupe de travail sur le reporting financier des risques liés au climat (TCFD). Nous sommes signataires des Principes pour l’Investissement Responsable de l’ONU et avons également signé la déclaration du Vatican de 2019 préconisant des régimes de tarification du carbone, que nous jugeons essentiels pour lutter contre le changement climatique.

BlackRock s’est associé à la France, à l’Allemagne et à des fondations internationales afin d’établir le Climate Finance Partnership, un des partenariats public-privé visant à améliorer les mécanismes de financement des investissements dans les infrastructures. Cette action répond à un besoin particulièrement urgent au sein des villes, car de nombreuses infrastructures municipales – des routes aux égouts, en passant par les transports en commun – ont été conçues pour des niveaux de résistance et des conditions météorologiques qui ne correspondent pas à la nouvelle réalité climatique. À court terme, certains des travaux visant à atténuer le risque climatique sont susceptibles de doper l’activité économique. Nous n’en sommes pas moins confrontés à un problème de taille à long terme. Nous ne savons pas quelles prévisions sur le climat s’avèreront exactes, sachant que certains impacts ont peut-être été sous-estimés. En revanche, le sens de l’évolution actuelle ne peut être contesté. Tout gouvernement, entreprise ou actionnaire doit faire face au changement climatique.

Une meilleure information des actionnaires

Nous pensons que tous les investisseurs, de même que les autorités de tutelle, les assureurs et le grand public, doivent avoir une idée plus précise de la façon dont les entreprises gèrent les enjeux liés au développement durable. Au-delà du climat, ces informations devraient inclure la façon dont chaque entreprise traite l’ensemble des parties prenantes : diversité de la main-d’œuvre, durabilité de la chaîne d’approvisionnement, ou encore protection des données concernant les clients. Les perspectives de croissance de chaque entreprise dépendent étroitement de sa capacité à exercer ses activités de façon durable et à satisfaire l’ensemble des parties prenantes.

Se mettre au service des parties prenantes et adopter une raison d’être deviennent des éléments de plus en plus centraux dans la manière dont les entreprises appréhendent leur rôle social. Comme je l’ai écrit dans des lettres précédentes, une entreprise ne peut réaliser des bénéfices à long terme sans adopter une raison d’être et sans tenir compte des besoins d’un large éventail de parties prenantes. Une entreprise pharmaceutique qui augmente implacablement les prix, une société minière qui néglige la sécurité, une banque qui ne respecte pas ses clients – ces entreprises sont susceptibles de maximiser leur performance à court terme. Toutefois, comme cela a été maintes fois démontré, ces comportements qui nuisent à la société finiront par se retourner contre l’entreprise et par détruire sa valeur pour les actionnaires. En revanche, un sens aigu de sa raison d’être et un engagement ferme envers les parties prenantes aident une entreprise à établir des liens plus étroits avec ses clients et à s’adapter aux exigences changeantes de la société. En définitive, la raison d’être constitue le moteur de la rentabilité à long terme.

Au fil du temps, les entreprises et les pays qui ne se soucient pas des parties prenantes et ne tiennent pas compte des risques liés à la durabilité se heurteront à un scepticisme croissant de la part des marchés financiers, ce qui se traduira par un coût du capital plus élevé. En revanche, les entreprises et les pays qui privilégient la transparence et démontrent leur sensibilité aux exigences des parties prenantes attireront plus efficacement des capitaux, notamment ceux de meilleure qualité et de plus long terme.

D’importants progrès ont déjà été réalisés pour améliorer la transparence de l’information – et de nombreuses entreprises accomplissent un travail exemplaire d’intégration et de communication sur le développement durable – mais ce mouvement doit encore se généraliser et se normaliser. Bien qu’aucun cadre ne soit parfait, BlackRock estime que le Sustainability Accounting Standards Board (SASB) fournit un ensemble clair de normes pour la communication d’informations sur le développement durable dans un large éventail de domaines, allant des pratiques de travail à la confidentialité des données, en passant par l’éthique des affaires. En ce qui concerne l’évaluation et la communication des risques liés au climat, ainsi que les questions de gouvernance essentielles à leur gestion, le TCFD fournit un cadre précieux.

Nous reconnaissons que la production de rapports respectant ces normes exige beaucoup de temps, d’analyse et d’efforts. BlackRock n’a pas encore atteint l’ensemble de ses objectifs en la matière et nous travaillons sans relâche à l’amélioration de nos propres rapports. Des informations conformes au cadre du SASB sont disponibles sur notre site Internet, et nous publierons des rapports en ligne avec le TCFD d’ici la fin 2020.

Depuis plusieurs années, BlackRock interroge les entreprises sur leur progression vers un reporting aligné sur les normes du TCFD et du SASB. Cette année, nous demandons deux choses aux entreprises dans lesquelles nous investissons au nom de nos clients, si ce n’est déjà fait : (1) publier des informations conformes aux lignes directrices sectorielles du SASB avant la fin de l’année, ou communiquer un ensemble de données similaires pertinentes au vu de l’activité de l’entreprise ; et (2) communiquer les risques liés au climat en ligne avec les recommandations du TCFD. Conformément aux lignes directrices définies par le TCFD, ces rapports devraient inclure votre plan d’exploitation dans un scénario conforme aux objectifs des Accords de Paris de limiter le réchauffement de la planète à moins de deux degrés.

Sur la base de ces informations et de nos échanges, nous vérifierons que les entreprises gèrent et surveillent correctement ces risques dans le cadre de leurs activités, tout en préparant l’avenir de manière appropriée. En l’absence de rapports précis, les investisseurs, y compris BlackRock, seront de plus en plus enclins à conclure que les entreprises ne gèrent pas les risques de façon appropriée.

Nous estimons que les administrateurs d’une entreprise qui ne s’attaque pas efficacement à un problème important doivent être tenus responsables de cette inaction. L’an dernier, BlackRock a voté contre - ou s’est abstenu de voter pour - 4 800 administrateurs de 2 700 entreprises différentes. Lorsque nous estimerons que les entreprises et les conseils d’administration ne fournissent pas d’informations pertinentes sur le développement durable, ou ne mettent pas en œuvre les moyens nécessaires pour gérer ces questions, nous en tiendrons les membres du conseil d’administration responsables. Compte tenu, d’une part, du travail préparatoire déjà accompli lors de nos précédents échanges à propos de l’amélioration de la publication d’informations et, d’autre part, de la progression des risques d’investissement liés au développement durable, nous voterons plus volontiers contre la direction et les administrateurs des entreprises ne faisant pas suffisamment de progrès en matière de rapports sur le développement durable ainsi que sur les pratiques d’entreprise et les programmes qui soutiennent leurs objectifs en la matière.

Un capitalisme responsable et transparent

Au cours de mes 40 années de carrière dans le secteur de la finance, j’ai été témoin de plusieurs crises et périodes de difficultés : les pics d’inflation des années 1970 et du début des années 1980, la crise monétaire asiatique de 1997, la bulle Internet et la crise financière mondiale. Même si certains de ces épisodes ont perduré de nombreuses années, ils avaient tous, tout bien considéré, une portée de relativement court terme. Le changement climatique est sans comparaison. Même si une faible proportion des impacts anticipés se concrétise, il s’agira d’une crise beaucoup plus structurelle et de plus long terme.

Les entreprises, les investisseurs et les gouvernements doivent se préparer à une réallocation significative des capitaux.

Les discussions entre BlackRock et ses clients à travers le monde montrent que ces derniers sont de plus en plus nombreux à souhaiter réallouer leurs capitaux à des stratégies durables. Si dix pour cent des investisseurs internationaux – ou même cinq pour cent – mettent ce projet à exécution, nous assisterons à des transferts de capitaux massifs. En outre, cette dynamique est vouée à s’accélérer, à mesure que la prochaine génération accédera à la direction des gouvernements et des entreprises. Les jeunes ont été les premiers à demander aux institutions – y compris BlackRock – de relever les nouveaux défis associés au changement climatique. Ils se montrent plus exigeants envers les entreprises et les gouvernements, tant en matière de transparence que d’actes. Au cours des prochaines décennies, des milliers de millards de dollars seront transférés vers la génération dite des « milléniaux ». Ces futurs dirigeants d’entreprises, directeurs financiers, responsables politiques et chefs d’État continueront de remodeler l’approche mondiale du développement durable.

Alors qu’une période de réallocation significative du capital se profile, les entreprises ont la responsabilité – et l’obligation économique – de fournir aux actionnaires une image claire de leurs efforts de préparation. À l’avenir, une transparence accrue sur les questions de durabilité constituera un atout essentiel pour la capacité de chaque entreprise à attirer des capitaux. En aidant les investisseurs à identifier les entreprises réellement au service des parties prenantes, cette transparence contribuera à réorienter les flux de capitaux. Cependant, la transparence ne peut constituer un objectif en soi. La publication d’informations devrait permettre l’émergence d’un capitalisme plus durable et plus inclusif. Les entreprises doivent s’engager résolument à accomplir leur raison d’être et à servir toutes les parties prenantes – leurs actionnaires, leurs clients, leurs collaborateurs et les collectivités au sein desquelles elles exercent leurs activités. Ce faisant, votre entreprise bénéficiera d’une plus grande prospérité à long terme, dont profiteront également les investisseurs, les employés et la société dans son ensemble.

Sincèrement,

Laurence D. Fink, Janvier 2020

* * *

A FUNDAMENTAL RESHAPING OF FINANCE


Harvard Law School Forum on Corporate Governance

Dear CEO,

As an asset manager, BlackRock invests on behalf of others, and I am writing to you as an advisor and fiduciary to these clients. The money we manage is not our own. It belongs to people in dozens of countries trying to finance long-term goals like retirement. And we have a deep responsibility to these institutions and individuals—who are shareholders in your company and thousands of others—to promote long-term value.

Climate change has become a defining factor in companies’ long-term prospects. Last September, when millions of people took to the streets to demand action on climate change, many of them emphasized the significant and lasting impact that it will have on economic growth and prosperity—a risk that markets to date have been slower to reflect. But awareness is rapidly changing, and I believe we are on the edge of a fundamental reshaping of finance.

The evidence on climate risk is compelling investors to reassess core assumptions about modern finance. Research from a wide range of organizations—including the UN’s Intergovernmental Panel on Climate Change, the BlackRock Investment Institute, and many others, including new studies from McKinsey on the socioeconomic implications of physical climate risk—is deepening our understanding of how climate risk will impact both our physical world and the global system that finances economic growth.

Will cities, for example, be able to afford their infrastructure needs as climate risk reshapes the market for municipal bonds ? What will happen to the 30-year mortgage—a key building block of finance—if lenders can’t estimate the impact of climate risk over such a long timeline, and if there is no viable market for flood or fire insurance in impacted areas ? What happens to inflation, and in turn interest rates, if the cost of food climbs from drought and flooding ? How can we model economic growth if emerging markets see their productivity decline due to extreme heat and other climate impacts ?

Investors are increasingly reckoning with these questions and recognizing that climate risk is investment risk. Indeed, climate change is almost invariably the top issue that clients around the world raise with BlackRock. From Europe to Australia, South America to China, Florida to Oregon, investors are asking how they should modify their portfolios. They are seeking to understand both the physical risks associated with climate change as well as the ways that climate policy will impact prices, costs, and demand across the entire economy.

These questions are driving a profound reassessment of risk and asset values. And because capital markets pull future risk forward, we will see changes in capital allocation more quickly than we see changes to the climate itself. In the near future—and sooner than most anticipate—there will be a significant reallocation of capital.

Climate Risk Is Investment Risk

As a fiduciary, our responsibility is to help clients navigate this transition. Our investment conviction is that sustainability- and climate-integrated portfolios can provide better risk-adjusted returns to investors. And with the impact of sustainability on investment returns increasing, we believe that sustainable investing is the strongest foundation for client portfolios going forward.

In a letter to our clients today, BlackRock announced a number of initiatives to place sustainability at the center of our investment approach, including : making sustainability integral to portfolio construction and risk management ; exiting investments that present a high sustainability-related risk, such as thermal coal producers ; launching new investment products that screen fossil fuels ; and strengthening our commitment to sustainability and transparency in our investment stewardship activities.

Over the next few years, one of the most important questions we will face is the scale and scope of government action on climate change, which will generally define the speed with which we move to a low-carbon economy. This challenge cannot be solved without a coordinated, international response from governments, aligned with the goals of the Paris Agreement.

Under any scenario, the energy transition will still take decades. Despite recent rapid advances, the technology does not yet exist to cost-effectively replace many of today’s essential uses of hydrocarbons. We need to be mindful of the economic, scientific, social and political realities of the energy transition. Governments and the private sector must work together to pursue a transition that is both fair and just—we cannot leave behind parts of society, or entire countries in developing markets, as we pursue the path to a low-carbon world.

While government must lead the way in this transition, companies and investors also have a meaningful role to play. As part of this responsibility, BlackRock was a founding member of the Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD). We are a signatory to the UN’s Principles for Responsible Investment, and we signed the Vatican’s 2019 statement advocating carbon pricing regimes, which we believe are essential to combating climate change.

BlackRock has joined with France, Germany, and global foundations to establish the Climate Finance Partnership, which is one of several public-private efforts to improve financing mechanisms for infrastructure investment. The need is particularly urgent for cities, because the many components of municipal infrastructure—from roads to sewers to transit—have been built for tolerances and weather conditions that do not align with the new climate reality. In the short term, some of the work to mitigate climate risk could create more economic activity. Yet we are facing the ultimate long-term problem. We don’t yet know which predictions about the climate will be most accurate, nor what effects we have failed to consider. But there is no denying the direction we are heading. Every government, company, and shareholder must confront climate change.

Improved Disclosure for Shareholders

We believe that all investors, along with regulators, insurers, and the public, need a clearer picture of how companies are managing sustainability-related questions. This data should extend beyond climate to questions around how each company serves its full set of stakeholders, such as the diversity of its workforce, the sustainability of its supply chain, or how well it protects its customers’ data. Each company’s prospects for growth are inextricable from its ability to operate sustainably and serve its full set of stakeholders.

The importance of serving stakeholders and embracing purpose is becoming increasingly central to the way that companies understand their role in society. As I have written in past letters, a company cannot achieve long-term profits without embracing purpose and considering the needs of a broad range of stakeholders. A pharmaceutical company that hikes prices ruthlessly, a mining company that shortchanges safety, a bank that fails to respect its clients—these companies may maximize returns in the short term. But, as we have seen again and again, these actions that damage society will catch up with a company and destroy shareholder value. By contrast, a strong sense of purpose and a commitment to stakeholders helps a company connect more deeply to its customers and adjust to the changing demands of society. Ultimately, purpose is the engine of long-term profitability.

Over time, companies and countries that do not respond to stakeholders and address sustainability risks will encounter growing skepticism from the markets, and in turn, a higher cost of capital. Companies and countries that champion transparency and demonstrate their responsiveness to stakeholders, by contrast, will attract investment more effectively, including higher-quality, more patient capital.

Important progress improving disclosure has already been made—and many companies already do an exemplary job of integrating and reporting on sustainability—but we need to achieve more widespread and standardized adoption. While no framework is perfect, BlackRock believes that the Sustainability Accounting Standards Board (SASB) provides a clear set of standards for reporting sustainability information across a wide range of issues, from labor practices to data privacy to business ethics. For evaluating and reporting climate-related risks, as well as the related governance issues that are essential to managing them, the TCFD provides a valuable framework.

We recognize that reporting to these standards requires significant time, analysis, and effort. BlackRock itself is not yet where we want to be, and we are continuously working to improve our own reporting. Our SASB-aligned disclosure is available on our website, and we will be releasing a TCFD-aligned disclosure by the end of 2020.

BlackRock has been engaging with companies for several years on their progress towards TCFD- and SASB-aligned reporting. This year, we are asking the companies that we invest in on behalf of our clients to : (1) publish a disclosure in line with industry-specific SASB guidelines by year-end, if you have not already done so, or disclose a similar set of data in a way that is relevant to your particular business ; and (2) disclose climate-related risks in line with the TCFD’s recommendations, if you have not already done so. This should include your plan for operating under a scenario where the Paris Agreement’s goal of limiting global warming to less than two degrees is fully realized, as expressed by the TCFD guidelines.

We will use these disclosures and our engagements to ascertain whether companies are properly managing and overseeing these risks within their business and adequately planning for the future. In the absence of robust disclosures, investors, including BlackRock, will increasingly conclude that companies are not adequately managing risk.

We believe that when a company is not effectively addressing a material issue, its directors should be held accountable. Last year BlackRock voted against or withheld votes from 4,800 directors at 2,700 different companies. Where we feel companies and boards are not producing effective sustainability disclosures or implementing frameworks for managing these issues, we will hold board members accountable. Given the groundwork we have already laid engaging on disclosure, and the growing investment risks surrounding sustainability, we will be increasingly disposed to vote against management and board directors when companies are not making sufficient progress on sustainability-related disclosures and the business practices and plans underlying them.

Accountable and Transparent Capitalism

Over the 40 years of my career in finance, I have witnessed a number of financial crises and challenges—the inflation spikes of the 1970s and early 1980s, the Asian currency crisis in 1997, the dot-com bubble, and the global financial crisis. Even when these episodes lasted for many years, they were all, in the broad scheme of things, short-term in nature. Climate change is different. Even if only a fraction of the projected impacts is realized, this is a much more structural, long-term crisis. Companies, investors, and governments must prepare for a significant reallocation of capital.

In the discussions BlackRock has with clients around the world, more and more of them are looking to reallocate their capital into sustainable strategies. If ten percent of global investors do so—or even five percent—we will witness massive capital shifts. And this dynamic will accelerate as the next generation takes the helm of government and business. Young people have been at the forefront of calling on institutions—including BlackRock—to address the new challenges associated with climate change. They are asking more of companies and of governments, in both transparency and in action. And as trillions of dollars shift to millennials over the next few decades, as they become CEOs and CIOs, as they become the policymakers and heads of state, they will further reshape the world’s approach to sustainability.

As we approach a period of significant capital reallocation, companies have a responsibility—and an economic imperative—to give shareholders a clear picture of their preparedness. And in the future, greater transparency on questions of sustainability will be a persistently important component of every company’s ability to attract capital. It will help investors assess which companies are serving their stakeholders effectively, reshaping the flow of capital accordingly. But the goal cannot be transparency for transparency’s sake. Disclosure should be a means to achieving a more sustainable and inclusive capitalism. Companies must be deliberate and committed to embracing purpose and serving all stakeholders—your shareholders, customers, employees, and the communities where you operate. In doing so, your company will enjoy greater long-term prosperity, as will investors, workers, and society as a whole.

Sincerely,

Larry Fink

Traduit de l’anglais par et pour : El Correo de la Diaspora

El Correo de la Diaspora. Paris, le 19 noveemebere 2022

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